- MARNES
- MARNESLes marnes sont des roches sédimentaires formées par un mélange de carbonates et de minéraux argileux. Hérité du celtique margila , marga , le terme «marne» (marl en anglais, Mergel en allemand) désignait initialement, et désigne toujours dans le langage populaire, des terres de composition, de couleur et de texture variables, dont la propriété commune est d’amender les sols.Les marnes sont très répandues depuis le Mésozoïque jusqu’à l’Actuel. Elles sont assez favorables à la conservation des fossiles et désignent souvent des formations avant une position stratigraphique précise. Outre l’amendement des sols, les calcaires marneux ont été beaucoup utilisés pour la fabrication des ciments avant que celle-ci ne devienne une opération chimique très précise.Caractères et typologieLes marnes sont intermédiaires entre les calcaires et les argiles, et le terme «marne» ne désigne pas une espèce pétrographique bien définie. On passe ainsi des calcaires marneux, qui ne contiennent que 5 à 35 p. 100 d’argile, aux marnes argileuses (de 65 à 95 p. 100 d’argile) par l’intermédiaire des marnes sensu stricto (de 35 à 65 p. 100).Comme les argiles, les marnes sont tendres, finement poreuses (elles happent à la langue), friables quand elles sont sèches, plastiques lorsqu’elles sont mouillées. Mais, à la différence des argiles, elles font effervescence avec les acides à cause de la présence du calcaire. La finesse des particules constitutives (minéraux argileux, carbonates et, parfois, silice en faible quantité) place les marnes dans le groupe des lutites , ou pélites [cf. GRANULOMÉTRIE].Suivant la composition minéralogique, on peut distinguer des marnes dolomitiques, glauconieuses, magnésiennes, gypseuses, micacées, sableuses, humifères. La craie blanche est appelée «marne» dans le nord du bassin de Paris, la Picardie en particulier, et les carrières où on l’exploite sont des «marnières ». Comme les marnes vraies, la craie est gélive: étalée en tas dans les champs avant l’hiver, elle se délite et devient pulvérulente au printemps. En Bretagne, on appelle aussi «marne» une arène dioritique riche en chaux.Souvent, les marnes sont désignées d’après leur couleur: ainsi dans le Bartonien supérieur (Ludien) du bassin de Paris, on distingue, au-dessus de la haute masse du gypse, la succession suivante: marnes bleues d’Argenteuil, marnes blanches de Pantin, marnes (ou «glaises») brunes à Cyrènes. Les «Scaglia» du Crétacé d’Italie (Apennins) entrent aussi dans la catégorie des marnes. Les «marnes irisées», colorées en blanc, rose, rouge et violet, correspondent au Keuper, terme le plus jeune du Trias.Il est commode de représenter la composition lithologique des marnes par des diagrammes où apparaissent les divers constituants. Ainsi, en se référant à la série comprenant l’Éocène supérieur et l’Oligocène inférieur du sondage de Montjavoult (cf. figure), on peut distinguer trois épisodes.– À la base, un épisode à argiles fibreuses magnésiennes (attapulgite et sépiolite) associées à la dolomite, équivalent latéral des couches de gypse du centre du bassin de Paris, et correspondant à une néogenèse de minéraux argileux en milieu basique;– À la partie moyenne, un épisode à illite et smectites (montmorillonite) où s’interpénètrent des apports d’origine marine (illite) et des argiles dérivées de l’arrière-pays calcaire (smectites);– À la partie supérieure, un épisode où apparaît la kaolinite, ce qui indique, à la base du Stampien, une reprise des apports détritiques d’origine continentale.Les marnes dans la série stratigraphiqueCertains lithofaciès marneux caractérisent plusieurs stratotypes du Mésozoïque et du Cénozoïque. Ce sont, notamment: les marnes noires de Thouars (Toarcien); les marnes de Carixia (ou Charmouth), en Grande-Bretagne (Carixien); les marnes du Monte Domaro, en Italie (Domérien); les marnes noires d’Aalen, en Allemagne (Aalénien); les marnes noires d’Oxford et celles de Kimmeridge, en Grande-Bretagne (Oxfordien et Kimmeridgien); les calcaires marneux de Berrias, dans l’Ardèche (Berriasien); ceux de Valangin et de Hauterive, près de Neuchâtel en Suisse (Valanginien et Hauterivien); ceux de Barrême, dans les Basses-Alpes, et d’Apt, dans le Vaucluse (Barrémien et Aptien). Ces formations présentent souvent une alternance de couches marneuses tendres, et calcaires plus dures, correspondant à des rythmes sédimentaires. Cette alternance lithologique est bien mise en évidence, à l’affleurement, par érosion différentielle. Au contraire, les marnes bleues de Tortona, en Italie (Tortonien), sont plus homogènes.Parfois, à l’ère secondaire, mais surtout à l’ère tertiaire, les formations marneuses sont désignées par leurs fossiles caractéristiques: marnes à spatangues de l’Hauterivien, marnes à plicatules de l’Aptien, marnes à Pholadomya ludensis du Ludien, marnes à huîtres du Stampien, marnes à bryozoaires du Priabonien.Diagenèse et métamorphisme des marnesPar diagenèse, les marnes donnent des schistes calcarifères qui, sous l’action d’un métamorphisme peu intense, se transforment en «schistes lustrés» qui jouent un si grand rôle dans les zones internes des Alpes. Un métamorphisme plus intense provoque la formation d’amphibolites et de pyroxénites. J. Wyart et G. Sabatier en France, H. Winkler en Allemagne ont obtenu des roches gneissiques ou granitiques par anatexie expérimentale en chauffant des marnes de 600 à 800 0C sous une pression de l’ordre de 2 000 bars.
Encyclopédie Universelle. 2012.